Une Étoile est (Peut-être) Née…

Top Chef en est à sa 16ᵉ saison. C’est énorme. À l’origine, le concept américain enfermait des chefs haut de gamme dans un château pendant un certain temps, etc. Un château, des pros… c’était fort proche de la Star Academy. Les adaptateurs français ont eu l’idée géniale de transformer ce concept en une émission de télé-réalité. Un casting, de l’angoisse, du suspens… tout est réuni pour accrocher le public pendant des heures du prime time à l’après-soirée. Les sponsors suivent, et, d’année en année, le niveau monte indéniablement.

On corse les difficultés, les épreuves font vibrer le public qui se choisit ses chouchous en fonction de ses sensibilités. La cuisine devient performance, loin, très loin de la réalité du terrain. C’est la « magie » du petit écran. Certes, cela crée des vocations chez les jeunes spectateurs, mais cela donne aussi des complexes à des tas de gens qui rêvent de « pimper » leurs chicons au gratin avec des petites fleurs déposées à la pince à épiler.

Comme tous les télécrochets, Top Chef doit régulièrement se réinventer et repousser les limites. Là où il s’agissait de cuisiner sur une plate-forme de Diner in the Sky à 40 mètres du sol il y a quelques années, il s’agit maintenant de cuisiner dans le noir, et bientôt probablement avec une main dans le dos, sur une jambe… et que sais-je encore.

Le Guide Michelin : De l’Âge d’Or à la Réinvention

Le Guide Michelin a été créé en 1900 par les frères… Michelin, inventeurs des pneumatiques, afin de diriger les voyageurs vers les garages proposant de réparer les pneus. Comme cela pouvait parfois prendre plusieurs heures, voire jours, ils eurent l’idée de recenser les endroits où se restaurer et, le cas échéant, loger non loin des garages. Au fil des années, une hiérarchie est née : 1, 2, 3 macarons ou étoiles suivant les commentateurs, consacrant les tables de France, puis de Belgique et maintenant du monde entier.

Le premier trois étoiles hors de France était d’ailleurs en Belgique. Mais tout cela, c’était à l’âge d’or du guide pneumatique. Dans les années 1970, la naissance de Gault & Millau, qui consacra la nouvelle cuisine, fut le premier coup de boutoir contre le monopole de Bibendum. Mais c’est internet et surtout l’avènement des réseaux sociaux qui sonnèrent le glas de la toute-puissance des guides en papier.

Depuis, le Rouge court derrière son lustre d’antan en tentant différentes formules, en investissant dans des concepts plus « jeunes », mais en perdant des lecteurs par paquets. Pourtant, auprès des professionnels, il reste LA référence ultime. Même des organisations aussi opaques que 50 Best et autres classements du genre, qui consacrent chaque année le meilleur restaurant du monde de manière totalement obscure, n’arrivent pas à détrôner le Petit Livre Rouge dans le cœur des chefs de la planète.

Il suffit de se rendre à la sortie du guide Belgique pour s’en rendre compte : le ban et l’arrière-ban de la restauration se damneraient pour monter sur scène et recevoir leur bulletin. Je connais des chefs qui dorment très mal quelques jours avant le verdict. Même dans les écoles primaires, les enfants sont moins affolés auprès de la maîtresse. Le lendemain, on en parle dans les médias, et puis le temps fait son œuvre. Seuls les meilleurs des meilleurs perdurent, et encore moins marquent l’histoire. Michelin crée la légende depuis plus d’un siècle.

Un Partenariat Risqué avec Top Chef

Le coup de pub du moment, c’est l’annonce par la production de M6 et de Michelin d’un partenariat professionnel. Pour cette édition, il y aura, en plus des chausse-trappes habituelles et des chefs de renom, un jury caché. Rien de moins que les célèbres inspecteurs anonymes du guide, placés dans un espace particulier.

Ajoutons à cela la création d’un restaurant éphémère, qui sera ouvert dès le lendemain de la finale par le gagnant de l’émission et qui pourrait, allez savoir, être auréolé d’une étoile dès son ouverture. Carrément.

La Fin de la Méritocratie ?

Hélas, c’est là qu’est l’os. Michelin était jusqu’ici la sanction ultime de la méritocratie. En partant de rien, avec du talent, beaucoup d’abnégation, du courage à revendre, il était possible d’accéder au Graal étoilé.

Un restaurant, c’est une équipe, un service, un accueil, une cave, un cadre, un concept même. Jamais un chef tout seul, aussi talentueux soit-il. Et même si quelques finalistes de Top Chef ont fait une carrière étoilée au firmament de la restauration française, ce n’est arrivé qu’après avoir démontré leurs qualités de patron pendant un temps certain.

Un Pari Risqué

En manque de visibilité, le guide a fait le choix de prendre le risque de se trouver en manque de crédibilité. Le temps long nous dira s’il s’est trompé ou non…

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