Décryptage du prosecco : origines, succès mondial et éléments clés à connaître

Petite histoire d’un phénomène planétaire unique

Même si le grand public découvre le Prosecco seulement depuis une grosse décennie, ce vin existe depuis près d’un siècle. Il est élaboré suivant une méthode très particulière nommée à la fois « Charmat » et « Martinoti». C’est au début des années 30 qu’Antonio Carpène, s’inspirant des travaux de l’œnologue Martinoti de la station œnologique de Turin en 1890 ;  va adaptter quelques éléments de la méthode d’Eugène Charmat, un Français qui a déposé un brevet de transformation de vin tranquille en vin pétillant à l’aide d’une cuve close en 1907. En stabilisant la méthode d’élaboration des vins pétillants de Vénétie, suivant ainsi ses recherches, l’homme n’a aucune idée de ce qui va suivre un jour…

Les raisons d’un succès

Lorsque le rideau de fer s’effondre à l’aube des années 90, les populations des anciens pays dit du « bloc de l’Est » n’ont pas vraiment de moyens économiques importants. L’envie de fêter leurs nouvelles vies avec, entre autres, des vins pétillants est plus forte que tout. Mais surtout plus en consommant les vins pétillants de l’Ex Urss. Qu’ils soient de Crimée ou d’ailleurs.

On produit à l’époque à peine une centaine de million de bouteilles de Prosecco. Un vin très floral, plutôt demi-sec, effervescent et bon marché. Grosso modo, un truc qui plait à tout le monde. Il y aura, alors, une véritable appel d’air. Les vignerons du Veneto, avec le soutien important des autorités locales, vont mettre tout en œuvre pour répondre à la demande. C’est le début d’une aventure industrielle extraordinaire. Une trentaine d’années plus tard, la région produit plus de 600 millions de bouteilles et le marché est plutôt tendu tant la demande est forte. C’est qu’entre temps, la vague du Spritz a submergé l’Europe de l’Ouest. Et pour élaborer un bon Spritz, il faut du prosecco. C’est la recette, même s’il y a aujourd’hui des dizaines de variantes, c’est toujours la recette originale qui fait la loi. Ajoutons-y un autre cocktail, le Bellini, qui lui aussi demande du prosecco et vous comprendrez que ce n’est pas vraiment demain la veille que la source risque de se tarir.

La consommation du pétillant vénitien sort aussi petit à petit des cocktails apéritifs. On le boit à la coupe, c’est un peu le complément du cava. D’autant que le marché du champagne est en mutation profonde et qu’étant donné les prix pratiqués, de plus en plus de consommateurs se tournent vers d’autres sources de bulles.

Un peu de géographie

La zone de production du prosecco se situe dans le nord-est de l’Italie sur 5 provinces de la région de Vénétie et 4 provinces de la région de Frioul-Vénétie Julienne. Pour faire simple entre Trévise et Trieste.

4 appellations

Comme rien n’est jamais vraiment simple en Italie, pas plus dans le monde vinicole qu’ailleurs, il y a donc 4 appellations de prosecco. De quoi y perdre son latin. La première, la plus large, prosecco DOC apparait en IGT en 1969. La plus récente : prosecco Rosé est lancée officiellement en 2020… je vous passe les détails des autres. Retenez seulement que si vous voyez la mention « Cartizze » sur une étiquette, c’est que ce vin est issu de la « meilleure » zone de l’appellation. Ce qui ne signifie pas pour autant qu’il soit vraiment exceptionnel. Ca, c’est dépendant du travail du vigneron et aucune appellation ne pourra jamais le garantir.

L’environnement

Si la production du prosecco est un succès indéniable, c’est aussi parce que le président de la région de la Vénétie y met tout son poids politique. Mais de nombreuses voix commencent à se faire entendre quant aux dégâts environnementaux que cette monoculture intensive occasionne dans la région. Il faut dire que la moindre parcelle utilisable est exploitée. Cela fait peser une pression terrible sur les sols au niveau de la régénération des surfaces travaillées. L’avenir nous dira ce qu’il adviendra. Mais d’ores et déjà cela semble parfois compliqué à gérer. Le millésime 2023 à arriver est difficilement sorti. Entre excès de chaleur et coulée de boue, il apparaît que cela ne sera pas forcément le millésime du siècle.

Des bulles et des chiffres

Pour élaborer un vin effervescent, il existe 7 techniques, promis je ne vais pas toutes les passer en revue cette fois.

En Belgique par exemple, comme chez nos voisins Français les plus proches, on élabore les bulles en suivant la méthode « traditionnelle » que l’on appelle « champenoise » dans les environs de Reims. Une refermentation en bouteille par ajout de levures et de sucre d’un vin tranquille. Les Crémants de France et de partout en Europe sont élaborés comme cela. Le champagne, le cava, la Franciacorta et bien d’autres encore aussi.

On peut aussi ajouter du gaz carbonique, comme pour les sodas. Cela donne des vins assez médiocres dans l’ensemble. Pas d’appellation mais des marques qui font semblant d’être « nobles » à des prix écrasés.

On élabore des vins partiellement fermentés, une seule fois directement en bouteille, que l’on nomme « Pet Nat ». Très à la mode en ce moment dans certaines zones de la capitale. C’est parfois vraiment très bon, ne vous limitez pas au premier regard et à vos préjugés.

Puis il y a le prosecco, issu d’une méthode unique nommée « Charmat » du nom du français qui l’a inventée ou « Martinotti » du nom de l’italien qui l’a améliorée et transposée dans le Veneto dans les années 30. Cette méthode consiste à remplacer la prise de mousse en bouteille de la méthode traditionnelle, par une seconde fermentation en cuve close. Ce qui est l’autre nom de cette méthode. Ces cuves énormes, généralement en inox, sont thermo-régulées, ce qui permet de gérer les fermentations au plus près. Une fois les fermentations terminées les vins sont passés sur des filtres tangentiels sous atmosphère contrôlée et embouteillés. Ce n’est pas très romantique vu comme cela, mais c’est cette industrialisation importante qui permet la production de vins très bon marché.

Le prosecco en quelques chiffres (2020)

28 100 hectares de vignes plantées

1173 vignerons

10 398 viticulteurs

364 marques déposées

638 millions de bouteilles vendues

10 % de prosecco DOC Rosé ( la plus récente des appellations)

19 % marché italien / 81 % marché étranger

Cépages autorisés : Glera, Chardonnay, Pinot gris, Pinot blanc, Pinot noir, Perera, Bianchetta, Verdiso, Glera Lunga.

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